Rien ne saurait réparer cette perte. Nulle
consolation ne saurait effacer l’abîme laissé par tant d’expériences,
d’accomplissements, de lectures, de joies et de veillées, tout ce qu’un
écrivain, un professeur, un militant politique aurait pu encore offrir et vivre
durant vingt années, si le destin ne l’avait pas arraché à la vie, victime d’un
attentat criminel à l’âge de quarante-cinq ans. Avec lui, ce sont des projets
inachevés et des rêves sans fin, ni contentement d'un présent, qui se sont
éteints.
Et rien ne comble le manque — le manque d’une voix, d’un sourire, d’une idée surgissant au cours d’une conversation, d’une malice échangée, d’un éclat d’esprit ou d’une fulgurance intellectuelle. Rien ne saurait remplacer cette pointe d'orgueil et de vanité assumée qui accompagnait Samir dans les réunions comme dans les soirées, et qui rendait toute neutralité impossible à son égard.